Ecrire sur un ami. Pour dire. La poésie des jours effacés. Pour dire. La transmission d’une vie aussi. Pour dire à ses filles qu’il est encore temps. Pour dire. A ses amis, qu’il est encore temps. Pour dire. Au monde entier, que le poète est vivant.
Dans sa chambre minuscule de la Maison Nationale des Artistes de Nogent, les peintures de Michel se serrent toile contre toile au milieu des livres. Dans cette chambre qui lui sert de placard, quatre pas seulement sont possibles, deux pas en avant et deux pas sur la gauche, ensuite il faut se ranger comme n’importe quel objet, comme tous les papiers. Entassés, empilés, alignés, éparpillés, Michel a maintenant toute sa vie à portée de main. Et toute sa vie comme il me l’a dit un jour, n’est qu’une vie de papier.
A chacune de nos rencontres il y a comme une urgence. Michel me confie des pages et des pages, manuscrites ou dactylographiées, cinquante années d’écriture, absolument inclassables, parfois illisibles, poésie en carnets, poésie en lettres d’amour, poésie jusqu’au bout de son chapeau. Prends ça aussi dit-il, tu en feras ce que tu voudras. Et regarde dans ce carton aussi, il y en a d’autres.
Que faire de tout cela ? Michel est né de la poésie, c’est elle qui décidera, je ne m’inquiète pas. Non. Mais il y a comme une urgence autour de nous.
Aujourd’hui je me suis décidé à publier quelques photos de ses décors, ils sont souvent changeants, au gré de ses déménagements ou des déséquilibres du mobilier, scènes minimalistes, petits tableaux, depuis que Michel et moi sommes amis, j’ai toujours remarqué les installations minutieuses qui entourent nos conversations. Ainsi au milieu des pinceaux, plumes d’oiseaux et autres objets en bois qui m’évoquent souvent les jardins de l’enfance, peuvent surgir des visages de femmes, femmes secrètes, femmes admirées, femmes racontées, toujours dans un coin de sa tête, dans un coin de sa chambre, comme au premier jour de leur connivence.
Aujourd’hui la lumière était belle, la lumière de l’été.
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