Au croisement de leurs rêves, Kaori SUZUKI et Sébastien VUILLOT ont créé la Compagnie TSURUKAM. Je les ai rencontré dans un festival de marionnettes en 2009, après avoir assisté à leur spectacle KAGOME je leur ai proposé de les interviewer pour les connaître un peu mieux. Je republie aujourd’hui cet entretien, soit dix années plus tard. D’autres créations, toutes aussi innovantes et réjouissantes, sont venues éclairer leur parcours et je suis toujours émerveillé par leur travail.
Daniel : A quel moment de votre vie s’est produit l’événement déclencheur, qui vous a décidé à suivre une carrière artistique… Remontons un peu le temps…
Kaori : J’ai commencé la danse à l’âge de six ans, lorsque je vivais à Singapour. Mes parents nous avaient inscrites, ma sœur et moi, dans un cours de danse classique. Ma mère souhaitait ainsi éviter toute jalousie entre ses deux filles. Moi ce qui me plaisait, c’était qu’à la fin du cours il y avait toujours un temps libre avec un pianiste qui jouait et les enfants pouvaient danser ou jouer librement. Ensuite, nous sommes revenus vivre au Japon à Yokohama et à partir de là, j’ai vraiment commencé à étudier la technique de la danse.
Ensuite, quand j’ai eu 18 ans, mes parents ont souhaité que je poursuive des études, mais je n’ai pas voulu, j’ai décidé de continuer la danse. En prenant cette décision, j’ai aussi pensé à la promesse faite à mon frère qui est décédé lorsque j’avais 16 ans. Avant de partir, il m’a dit : « si tu veux continuer dans la danse, continues mais vas jusqu’au bout ! »
J’enseignais la danse aux enfants et aux adultes, je faisais des spectacles… Je passais des concours… Je ne vivais que pour la danse !
Sébastien : Au Japon ils n’arrivent pas à vivre de la danse ! Ils sont obligés d’enseigner, de donner des cours. Il n’y a pas de subventions.
Kaori : J’ai vécu ainsi pendant six ans, jusqu’à l’âge de 24 ans. Il n’y avait dans ma vie que la danse, chaque jour et du matin jusqu’au soir. Pourtant à l’occasion d’une semaine de vacance je suis venue visiter Paris.
Sébastien : Et depuis douze ans elle vit à Paris ! (rires)
Kaori : Non ! Mais au lieu de rester seulement une semaine, je suis restée un mois et demi ! Au début, j’étais simplement en visite à Paris. J’en ai profité pour aller voir quelques cours de danse et j’ai rencontré un professeur qui m’a suggéré de passer des auditions pour une compagnie en Allemagne. Grâce à une lettre de recommandation de sa part, j’ai pu intégrer cette compagnie pour quelque temps, mais ça n’a pas vraiment marché. Je suis donc retournée au Japon et j’ai annoncé à mes parents que je voulais repartir en France et danser en Europe !
Daniel : Et tu es revenue en France !
Kaori : Oui depuis le 14 décembre 1996 je suis ici. Je suis arrivée toute seule avec deux valises (rires).
Daniel : Et pour toi Sébastien… Remontons le temps ! Tes études, tes activités artistiques…
Sébastien : Les études, pas trop. Je faisais de la guitare, un peu de théâtre aussi. Je suis originaire de province. Mes parents n’étaient pas culturellement très « branchés » mais ils m’ont laissé apprendre la guitare. Moi, ce qui m’a permis d’avancer un peu, c’est le fait d’entrer à la SNCF, j’ai été cheminot en fait !
Daniel : Voilà un scoop !
Sébastien : J’étais apprenti en mécanique générale à Lyon. Ca plaisait bien à mon père qui était un ouvrier spécialisé. Il était heureux que son fils suive la voie familiale. La voie ferrée bien sûr. Puis j’ai été muté sur Paris.
Daniel : Comment fait-on pour passer de la voie ferrée à la danse ?
Sébastien : J’étais donc électricien sur Paris dans les années 85 et en discutant avec un de mes collègues, il me raconte qu’il fait de la danse. De la danse ? Je n’avais aucune idée de ce que la danse pouvait être ! Je n’avais même jamais vu de comédie musicale ! Et il me dit : « Je vais prendre un cours ce soir, tu n’as qu’à venir si tu veux savoir ». Je l’ai pris au mot, je suis allé voir son cours et je m’y suis inscris !
Daniel : C’était quel style de danse ?
Sébastien : Jazz. Je me suis retrouvé plongé dans un monde que je ne connaissais pas.
Daniel : Et cette confrontation avec ce monde nouveau, elle t’a semblée évidente ?
Sébastien : C’est un peu comme Kaori lorsqu’elle est venue en France, elle est ensuite rentrée au Japon puis elle a dit : « JE DOIS ». Moi j’ai regardé le cours de danse et immédiatement après j’ai payé mon inscription pour trois cours par semaine !
Daniel : En repensant aux chemins que vous avez parcouru jusqu’à aujourd’hui, l’un comme l’autre, pouvez-vous dire qu’au fond de vous il y a quelque chose qui vous a guidé ?
Sébastien : Absolument. Dès le départ.
Daniel : Pour la plupart des gens, le rêve peut être de réussir dans son métier, d’avoir une belle maison etc… Mais quand j’utilise le mot rêve, je souhaite aller un peu plus en profondeur…
Sébastien : On pourrait parler de résonance intérieure… En ce qui me concerne, il a toujours été là, en moi. Ce besoin de trouver des portes, des ouvertures. Un rêve d’ailleurs… Une aspiration, un espoir qu’il existe autre chose que ce qui m’entoure.
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Daniel : Est-ce que ça veut dire qu’un artiste a toujours envie d’échapper à son présent ?
Kaori : Moi je vis avec le présent ! Bien sûr quand on est jeune, on rêve d’obtenir une bonne situation, de danser comme tel danseur, mais au bout d’un moment… Maintenant c’est différent, il y a la vie quotidienne et chaque jour compte. Ca ne veut pas dire que je ne progresse plus. Dans la danse, à chaque instant le corps change, on essaie de s’améliorer avec ces changements…
Daniel : Donc, si je te comprends bien, grâce à ton quotidien, grâce au temps qui passe au quotidien, tu continues à suivre un chemin, et tu ne t’es pas arrêtée !
Kaori : Je ne m’arrête pas. Mais je ne fige pas le chemin. Je ne me fixe pas d’objectif. Mon objectif c’est « tous les jours ». Je laisse venir les évènements…
Daniel : Qu’il est difficile de laisser venir les choses sans les subir ! La majorité des gens qui ne sont pas artistes sont asphyxiés par leur quotidien, ils n’ont de temps pour rien, parce qu’ils laissent venir justement, ils sont tenus en laisse par leur quotidien !
Sébastien : Mais il faut laisser venir les choses en étant actif ! On ne peut pas projeter d’objectif car il est toujours en mouvance, alors il est important de laisser les choses en suspension, elles sont simplement là, il faut les alimenter le temps nécessaire à ce qu’elles prennent leur place naturellement. Si on avait le schéma de ce qui va être dans l’avenir, on ne chercherait pas quelque chose !
Daniel : L’un comme l’autre, que ce soit dans la danse ou dans l’art de la marionnette, vous suivez des apprentissages techniques. Est-ce que l’on peut dire que vous avez le désir, dans l’avenir, d’arriver à un certain niveau ?
Kaori : Quand j’ai quitté le Japon, j’étais tout de même soucieuse… Non pas d’être reconnue, mais de pouvoir dire : « j’ai travaillé avec telle ou telle personne, j’ai fait ce travail là » et aussi pouvoir sentir ce que j’ai acquis !
Je ne cherche pourtant pas à être fière d’annoncer que je travaille dans telle compagnie, je ne me nourris pas des noms ! Mais pour les gens « normaux » les noms sont importants. Pour moi, ce n’est pas très important. Mais quand je pense à ma famille alors cela devient important. Parce qu’ils ont consenti à beaucoup de sacrifices pour moi. Ils sont déjà heureux de savoir que je travaille pour l’Opéra de Paris, même si mon travail n’y est pas directement en rapport avec la danse. Pour eux c’est tout de même l’Opéra de Paris !
Sébastien : On a tout de même l’obligation de réussir notre parcours professionnel par rapport à ceux qui ne connaissent pas le fond le notre travail et de notre engagement. Ils ont besoin de savoir à qui ils ont affaire. Nous le savons car lorsque les gens nous questionnent, c’est toujours difficile pour nous d’expliquer de ce l’on fait. Par exemple quand tu dis « je suis architecte », les gens ont l’image d’un architecte qui construit des maisons, mais quand je parle de la danse ou que je dis que je suis marionnettiste, les gens pensent encore à Guignol etc…
Daniel : Abordons maintenant le thème du spectacle que vous avez créé : KAGOME. Sébastien, tu joues le rôle d’un homme qui est fasciné par la possession de l’or. Il se laisse conseiller par deux mauvais génies (les marionnettes) alors que dans sa vie quotidienne il possède déjà une vraie richesse, puisqu’il est aimé de cette femme oiseau que joue Kaori…
Sébastien : Il est mis face à une partie de lui-même dont il n’avait pas conscience, une facette de lui-même qui n’avait jamais été sollicitée et les deux marionnettes sont les détonateurs de tout cela. A l’origine, il n’est qu’un paysan très modeste qui se suffit de ce qui l’entoure. Mais s’il n’avait pas eu cette facette, les deux compères n’auraient pas pu jouer la-dessus !
Kaori : C’est la faiblesse humaine. Vivre modestement lui suffisait. Mais l’homme peut changer subitement suite à un événement.
Sébastien : On est toujours à la merci des choses. Lui il ne s’est jamais tenu sur ses gardes. Il a soigné l’aigrette, sans se poser la moindre question. C’était évident, un animal avait besoin de lui.
Daniel : Quel est le message de KAGOME ?
Kaori : Jusqu’à quel point peut-on tenir une promesse avec soi-même, ou avec les autres.
Daniel : Jusqu’à quel point on peut être sincère avec soi-même ? Autrement dit, à quel moment on peut basculer…Ca m’intéresse beaucoup ! La question que je pose souvent aux artistes : Faites-vous une différence entre le désir et le rêve ?
Sébastien : Pour moi le désir est immédiat. Le rêve est quelque chose de moins ciselé, les contours sont moins définis. Le désir est plus basique. Quand tu as envie de manger un gâteau, tu sais à quoi il correspond, c’est direct. Le rêve est insaisissable, tu ne l’as jamais le rêve, tu vas vers le rêve…
Daniel : Peut-on dire que les artistes sont à la poursuite d’un rêve au fond d’eux et que les autres qui ne sont pas artistes sont plus en proie aux désirs, de posséder, de ressembler…
Kaori : Moi je pense que pour continuer dans la voie artistique il faut des désirs et des rêves. Il faut les deux. Parfois il faut être très direct, savoir saisir tout de suite quand tu sens que quelque chose vient vers toi. C’est le désir de prendre. Le rêve c’est quand même plus loin.
Sébastien : Si tu es un artiste qui joue sur scène, tu dois jouer au temps présent. Donc tu es obligé d’ETRE le personnage, avec tous ses désirs. Par contre, dans la création, dans la construction du spectacle, c’est plus confus, on peut le concevoir en rêvant. Mais une fois dans la peau des personnages, on est obligé de faire, de vivre ! Le rêve est un décalage par rapport au présent. On vit dans un rêve, mais notre obligation est de transposer ce rêve, l’amener sur scène, pour qu’un spectateur puisse entrevoir notre rêve…
Daniel : « Pour que le spectateur puisse entrevoir notre rêve… » Pensez-vous que le travail d’un artiste soit d’aider les autres gens à vivre mieux ?
Kaori : J’aime faire voyager les gens, les faire sortir de la vie quotidienne.
Daniel : Ils sortent de la vie quotidienne le temps d’un spectacle, puis ils retournent à leur vie quotidienne… Mais est-ce qu’une graine a été planté en eux ?
Kaori : Je ne veux pas absolument leur imposer un message, je souhaite simplement que le moment que nous passons ensemble, nous permette de partager ce que nous avons à leur donner.
Daniel : Vous essayez de donner quoi ? Il y a forcément quelque chose qui passe, c’est un spectacle sensible qui s’adresse à des êtres sensibles…
Sébastien : Oui, on le sait bien, bien sûr que quelque chose passe et notre but est qu’ils emmènent quelque chose, mais cette chose là, on ne sait pas à quoi elle correspond. C’est quelque chose qui transite par nous, c’est l’histoire et l’âme des personnages, et si le public la reçoit, ça veut dire que nous on a fait notre travail.
Daniel : Cette histoire vous ne l’avez pas choisi par hasard.
Sébastien : On ne l’a pas choisi.
Daniel : Mais cette histoire vous correspond de toutes façons. C’est cela que vous offrez au public. Peut-on dire que cette histoire reflète un peu un rêve à l’intérieur de vous-même, un rêve très personnel ?
Sébastien : Si nous arrivons à jouer ce conte, c’est qu’il n’est pas si éloigné de nos intériorités respectives. Nous avions demandé à la maman de Kaori de nous choisir un conte à jouer. Donc c’est quelqu’un d’extérieur à nous qui a choisi ce conte et elle nous imaginais bien jouer ce genre de conte. Nous savons maintenant pourquoi elle nous a choisi cette histoire ! (rires) Parfois on guide et parfois on se fait guider. On a eu la chance d’avoir des personnes autour de nous pour nous aider.
Daniel : Croyez-vous à la responsabilité de l’artiste ? Lorsqu’il présente son travail au monde, que ce soit un peintre ou un musicien ou un danseur, pensez-vous qu’il doit être responsable de l’effet qu’il va produire sur le monde ?
Sébastien : Il a la responsabilité de respecter les personnes qui viennent le voir.
Daniel : Respecter ça veut dire quoi ?
Sébastien : Ca veut dire, considérer comme nos pères les personnes qui viennent nous voir. On fait partie de la même famille. Entre eux et nous existe un pont universel. Et c’est ce pont universel qui me semble intéressant. En tant qu’artiste ou en tant qu’être humain, chaque personne est isolée, seule. On est tous seuls, mais, de temps en temps on trouve des passerelles… La responsabilité c’est d’en créer le plus possible ! C’est aussi l’objectif de notre pièce (KAGOME), amener la culture asiatique et sa sensibilité vers le monde occidental.
Daniel : Kaori, dans ta pratique de la danse, comment as-tu rencontré la culture occidentale, as-tu connu le choc d’une rencontre significative avec un professeur ou un maître occidental ?
Kaori : Déjà, moi j’ai commencé par la danse classique. Donc c’est la danse de type occidental.
Daniel : Alors on peu parler d’un choc à l’inverse !! Tu es habité par l’âme japonaise mais tu l’as rencontré en France !
Kaori :J’ai eu une amie japonaise qui faisait du Buto et qui m’a proposée de travailler avec elle, mais j’ai tout d’abord refusé. Plus tard, elle me l’a proposé une seconde fois et c’est à ce moment là que j’ai accepté de rencontrer Carlotta IKEDA qui m’a engagée pour reprendre un rôle dans sa pièce HARU NO SAITEN. Je suis donc entrée dans la Compagnie de Carlotta IKEDA sans rien connaître de la danse Buto. Pour moi ce fut un grand choc. La danse Buto était à l’opposé de ce que je faisais en danse classique !
Ce n’est donc pas après avoir vu un spectacle de Buto que j’ai ressenti l’envie de travailler avec Carlotta IKEDA. Mais cela s’est produit par un concours de circonstances très particulières, liées avant toute chose à une rencontre et à l’opportunité d’aborder mes racines japonaises.Et c’est à la suite de mes deux années de travail avec Carlotta IKEDA dans la danse Buto que l’on a créé cette pièce (KAGOME). Parce que le Buto a provoqué un choc en moi, m’a ramené dans mon pays.
Daniel : C’est complètement fou ça ! Tu es venues en France pour retrouver…
Sébastien : Pour trouver !
Kaori : Après cette expérience j’ai souhaité qu’on fasse un spectacle mixte. Avec une moitié de chacun de nous deux !
Daniel : Ca me rappelle ton personnage dans KAGOME ! Avec ton masque qui est moitié femme, moitié oiseau.
Kaori : En fait, jusqu’à aujourd’hui, j’ai vécu plus de temps à l’extérieur qu’à l’intérieur du Japon ! Je suis japonaise, née au Japon, mes parents sont japonais et je me sens dans mon esprit plutôt japonaise. (rires)
Sébastien : C’est une vraie japonaise ! (rires) Ce qui moi, m’a choqué, c’est que lorsque tu vas au Japon, tu vois que les japonais sont très ouverts à la culture occidentale, et à l’inverse, les français ne connaissent absolument rien de la culture japonaise ! Souvent les gens en France n’ont pas conscience que d’autres pays puissent exister avec des structures traditionnelles bien aussi fortes que les nôtres !
Kaori : Quand je l’ai rencontré, il était comme ça ! Il ne connaissait rien du Japon ! (rires)
Sébastien : Je n’avais jamais été attiré par l’Asie, je n’y connaissais rien ! C’est comme pour la danse !
Daniel : Les choses te tombent dessus parce qu’il est l’heure ! (rires)
Kaori : La vie est extraordinaire ! Comment est-ce qu’on a pu se rencontrer en étant chacun à l’extrême de l’autre ? Et tu ne peux pas décider, les choses viennent…
Daniel : Tu penses qu’on ne décide de rien ?
Sébastien : On se laisse disponible pour quelque chose !
Kaori : Pour revenir à la différence entre le rêve et le désir, peut-être que la culture occidentale est plus en relation avec le désir et la culture orientale avec le rêve… Les asiatiques préfèrent le rêve, laisser libre l’imagination, ne pas aller chercher les choses mais les laisser venir. Mais avec la culture occidentale, c’est le désir de ton ego qui est de plus en plus fort…
Daniel : Je suis un peu d’accord avec toi, mais avec la monde moderne, j’ai tendance à penser que c’est toute la planète qui se laisse manipuler par ses désirs… Mais peut-être que toute la planète est également habitée par un rêve ? Pensez-vous que chaque personne sur Terre est habitée par un rêve qu’elle doit réaliser au cours de sa vie ?
Sébastien : J’espère que oui… J’espère que oui ! (rires) Mais que nous n’ayons que le temps d’une vie pour le réaliser, je n’en suis pas persuadé. Sur plusieurs vies, pourquoi pas… Il faut accepter le stade qui est le notre pour le faire avancer et c’est peut-être de là que vient la frustration de beaucoup de gens.
Daniel : Lorsque quelqu’un décide d’orienter sa vie vers la pratique d’un art, malgré tous les sacrifices que cela suppose, peut-on dire qu’au fond d’elle, cette personne n’a pas le choix de faire autrement, qu’elle est dans l’urgence ?
Sébastien : C’est une possibilité parmi beaucoup d’autres !
Daniel : Vous pensez qu’il n’en va pas de même pour tous les artistes ?
Kaori : Dans la danse il y a tout de même le physique qui compte, quand tu prends de l’âge tu n’a plus la même musculature. Dans la danse classique, à trente ans certaines danseuses disent qu’elles sont trop vieilles pour continuer la danse. Mais moi je ne pense pas du tout comme cela. Je sens qu’il n’y a pas de limite. Quand tu te recentres sur toi, tu prends conscience de ce que tu es, de ce que tu es en train de faire, tu n’as pas de peur ! Tu n’es plus dans l’urgence ! Tu continues à évoluer, petit à petit, tu essaies toujours d’avancer.
Daniel : Oui, mais avancer vers quoi ?
Kaori : Avancer vers ce que tu as de meilleur en toi.
Daniel : Vous pratiquez tous les deux la danse, mais je pourrais poser la même question à un peintre. Est-ce que nous sommes en train de parler de performances physiques lorsque nous disons avancer vers le meilleur de nous-même » ? Ou bien est-ce qu’on parle d’autre chose ? Vers le meilleur de soi- même, avec le corps comme outil ?
Kaori : C’est un ensemble, il n’y a pas de séparation entre le corps et l’esprit.
Sébastien : Notre travail de création est axé sur l’être humain. Donc nous travaillons sur les thèmes de la vie et de la mort. Et même si en esprit nous pouvons envisager un temps infini, nous avons tout de même au-dessus de nos têtes, cette épée de Damoclès de la mort et de la vie ! Effectivement cela crée une urgence de vie ! Une urgence d’être en vie et de se trouver dans cette vie pour avoir la sensation d’être, et se dire que ce n’est pas un rêve ! (rires)
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Kaori :Une urgence ? Non, si la vie s’arrête, qu’importe le moment, si on a pu avancer jusque là, alors c’est déjà beau. Pourquoi fixer des limites ? C’est infini. Je sens qu’avant de naître, la vie est déjà programmée, il y a un chemin mais on ne le sais pas.
Daniel : C’est une vraie complémentarité Est-Ouest qui vous unie tous les deux ! (rires)
Sébastien : Philosophiquement, sur ce temps éternel, je suis d’accord. Mais par contre, par rapport aux personnes que l’on croise dans notre vie, j’éprouve un sentiment qui peut ressembler à une urgence. Il faut être là et vraiment là ! C’est important.
Daniel : C’est rare d’être vraiment là ! Et c’est peut-être ce que recherchent, sur un plan inconscient, les artistes qui se produisent sur une scène ?
Sébastien : Oui, bien sûr ils ont le sentiment d’exister et d’avoir ce contact. Le rêve de l’existence partagé ! (rires)
Cette interview a été réalisée le 23/05/2009 à Paris (12). Traduction japonaise Harumi Suzuki.
Le site officiel de la Compagnie Tsurukam
鈴木香里とセバスチャン・ヴュイヨ、2人の夢が交差して形になった劇団TSURUKAM。 気さくな2人の役者とKIKOERU ?のハッピーで感性豊かな会話をどうそ!
Daniel(以下D):アーティストとして生きる決心をしたきっかけはいつ起きたの?少し過去を振り返ってみたいんだけど…
Kaori:(以下K):私は6歳からダンスを始めたの。その頃はシンガポールにいたわ。私と姉のために両親がクラシックダンスのクラスに申し込んだの。母は姉妹の間に競争心が起きないよう望んでいたわ。私は、レッスンの最後に伴奏ピアニストと自由に踊ったり遊んだりする時間だけが楽しみだった。その後横浜に戻ってから、本格的にダンスを習うようになったの。
18歳になった時、両親は私に学業を続けて欲しかったけど、私はそうしたくなかった。そしてダンスを続ける事を決めたの。この決断には、私が16歳の時死んでしまった兄と交わした約束も影響あるわ。兄は私に「もしダンスを続けたいなら、続ければいい。その代わりとことんやってね!」と言ったの。
その後は子供や大人にダンスのレッスンをしたり、舞台に立ったり…コンクールも受けたりした。要するにダンスしかしてなかったってわけね!
セバスチャン(以下S):日本ではダンスで生活していく事は難しいね。教える仕事と平行していかないと暮らしていけない。国からの補助金もないし。
Kaori :そうして6年経って24歳になった。その頃は毎日朝から晩までダンスばっかりの生活だったわ。そんな中1週間ヴァカンスが取れて、ひょいっとパリに行ってみたわけ。
Sebastien :それから12年間、パリに住み付いてる!(笑)
Kaori :そうじゃなくってね!その時は1週間の予定が1ヵ月半になっちゃったの。最初はただの観光だったんだけど、ダンスのレッスンをいくつか見学させてもらっているうちに、ドイツの劇団のオーディションを受けてみたら?なんて勧めるダンス講師に出会ってしまった。そして推薦状を書いてもらったのが功を奏して、なんと劇団に合格。少しの間そこで仕事が出来る事になった。でも結局あまり上手く行かなったけど。その後日本に戻り、両親にフランスに住みたい、ヨーロッパでダンスをやりたいって宣言したの。
Daniel :そしてフランスに戻ってきたってわけだね!
Kaori;そう、パリに戻ったのは1996年の12月14日。私は1人ぼっち、しかも荷物はたった2つのカバンだけ(笑)。
Daniel :さて。セバスチャンはどう…?過去の話から聞かせて欲しいな。学業やアート活動について…
Sebastien : 学業はね、あんまり。ギターを習ったり、演劇もちょっとだけやってみたり。僕は田舎育ちで両親もいわゆる「文化的」ではなかった。でもギターは続けさせてくれたよ。少し変化し始めたのはSNCFに入社した時かな。僕、実は鉄道員だったんだ!
Daniel : なんと大スクープ!
Sebastien : 僕はリヨンで機械工学の教習生になった。機械技師をしていた僕の父にとって、僕の選択は喜びだった。自分の後を継ぐ息子を持って幸せだったってわけ。鉄道関係って意味。その後僕はパリへ移動が決まった。
Daniel :それで鉄道員からダンサーへ、どうやって変身を遂げたの?
Sebastien :1985年のパリ、僕は電気技師として働いていた。ある日同僚と話しているうちに、彼がダンスを習ってると打ち明けたんだ。ダンス?ダンスって何って思うくらい僕はダンスを知らなかったんだよ!ミュージカルすらも見た事がなかったしね。同僚が「今夜ダンスのレッスンがあるけど、もし興味あるなら来てごらんよ」って言うから彼の言葉通りレッスンを見に行って、その場でクラスに申し込んじゃった!
Daniel :どんなスタイルのダンスだったの?
Sebastien : ジャズダンス。僕は自分の全く知らない世界に横たわっていたよ。
Daniel :この未知との遭遇が、自分にピッタリ来ちゃった?
Sebastien : 香里がフランスから日本に戻った時「やらなくちゃ」って言ったのと少し似ている感覚かな。何しろダンスのレッスンを見てすぐ直後、3週間分のレッスン申し込みの支払いをしていたからね!
Daniel :2人は今日までの道のりを振り返ってみて、何かが自分たちを導いたように思う?
Sebastien : 絶対そう。最初からそうだったと思う。
Daniel : 多くの人にとって夢とは、<仕事を成功したい><大きな家を持ちたい>って意味だったりするけど、僕は<夢>って言葉を使う時、もうちょっと深い話をしたいんだよね…。
Sebastien : 夢は自分の内側で響くとも言えるかな。僕に関して言えば、夢はいつもあった。自分の中に。入り口を見つけたい、夢への扉を探す必要があった。普段の自分の世界とは別に存在する夢…あこがれや希望とか。
Daniel :アーティストは現実の世界から逃れたい願望が常にあるってことかな?
Kaori : あら私は現実と一緒に生きてるわよ!そりゃ若いときは、成功したい、あの人みたいに踊れるようになりたいって夢みる時もあるけど、しばらく経つと…今は違う考えになったわ。普段の生活があるし毎日が大切。だからってもう進歩出来ないって事じゃないわ。ダンスはね、毎日身体が変化するからそれと共により良いものを見つけていけるの。
Daniel : なるほど。僕の理解が正しければ、君にとっては普段の生活があってこそ道を続けられる、だからやめなかった、というわけだね。
Kaori : やめたりなんかしないわ。でも凝り固まりたくないわね。私は目標を定めないの。だって私にとっては毎日生きる事こそが目標だから。来るものをそのまま受け入れる生き方って言うか…
Daniel : 受け身にならずに来るものを受け入れるって難しいよね!毎日の生活に窒息しそうな人って多いでしょ。時間がないのは来るものをただ受け入れて習慣のまま生きているからだと思うんだ。
Sebastien :でも、あくまでも積極的じゃないとダメだよ !目標って計画するものじゃないわけ。だっていつも変わるから。だからたまには物事を宙ぶらりんにしておく事も大切。自然に目標が見つけるまで時間を与えてやる。もし将来図があるのなら、無理やり探さない。
Daniel :ダンスであれ人形劇であれ、2人とも技術を取得したでしょ。将来ある程度のレベルにはなりたいって思っていた?
香里:日本を離れた時ね、私やっぱり心配だった。有名になれるか、よりも「私は誰々と仕事をしました、こんな仕事をしてきました」って言えるようになるのかしら、やって良かったと思えるかしらって。
どの団体と仕事をしたか、なんて私には重要じゃない、それで高名になるわけでもないし!でも普通の人は「誰と」って大事なのよね。私はとっては重要じゃないけど、日本の家族を思うとね。私のために大きな犠牲を払ってくれたから。家族は私がパリのオペラ座で仕事したって聞けば喜ぶ。それがダンスとは直接関係無くても、彼らにとってはパリ・オペラ座に変わりはないわけ。
Sebastien : 家族のため、僕らの活動内容をよく分かっていない人のためには、やっぱりプロとして成功しないといけない。何をしているのか、周りは知りたがるでしょ。僕らは周りから質問されると、自分たちの活動についてどう答えたらいいかわからない事がよくある。例えば「自分は建築家です」と言うとしよう。人々は建築家と聞けば、家を建てているんだ、というイメージがすでにあるからいい。でもダンスやマリオネットをやっていますと言うと、彼らは未だに子供用の人情劇をイメージしてしまうんだね…
Daniel : さて、ちょっと君たちの演劇<KAGOME>について話そうよ。セバスチャン、君は金に目が眩む男を演じているね。男は、2人の悪い精霊(人形)の言いなりになってしまう。本当はすでに本物の財産、鳥が姿を変えて現れた女性(香里)を得ているのに…
Sebastien : 男は自分の知らない部分と向き合うんだ。決してそうなりたいと思ったわけではないけれど、2人の精霊の存在が起爆剤になってしまった。オリジナルでは主人公は非常に質素で、あるもので満足して生きている農民でしかない。でも自分でも気がつかない影の部分がなければ2人の言うなりになる事はなかった。
Kaori :人間の弱さよね。質素な暮らしに満足していたはずなのに。人間は突然変わってしまうこともある。
Sebastien :人はみんな助け合って生きている。彼は何も予期していなかった。全く下心はなく、羽根を治してやった。単純なことだよね、傷ついた動物が彼を必要としていたんだもの。
Daniel : KAGOMEが伝えようとしている事は何かな?
Kaori : どこまで自分や他人の約束を守る事が出来るか。
Daniel : どこまで自分に正直でいられるか?言い換えれば、どこで人生がひっくり返ってしまうか…。とても興味深いね!ところで僕がアーティストたちによくする質問があるんだけど、欲望と夢って別のものだと思う?
Sebastien:僕にとって欲望は、即決できるもの。夢は何だか不ぞろいで輪郭のハッキリしないもの。欲望はもっと基本的。例えばお菓子が食べたい時どうすれば良いかは、単純だよね。夢は捉えられないもの、見た事もないのにそっちに向っていくような…
Daniel :アーティストたちは彼らの奥深くに眠る夢を追いかけ、それ以外の人は欲求の餌食となって、取り付かれ、みんな似たようになってしまう…と言えるだろうか。
Kaori:私はアーティストを続けていくには欲求も夢も両方必要だと思うわ。時にはハッキリしないといけない時だってある。何かが起きている、と分かっている時はすぐに決めないと。欲求優先、と言うわけね。夢はもうちょっと遠くにあると思う。
Sebastien :ダニエル、もしも君が舞台俳優だったら、現在という時間の中で演じるしかないよね。という事は登場人物になる必要がある。なりたい、という欲求とも言える。それに対して、演劇創作中はもっと不明瞭。色々夢を見つつ構想を立てる。でも1度決まれば、やるしかない。役になりきるのみ。そう言う意味で夢って現実とかなり時間差があると思う。
僕らは夢見て生きているけど、その夢を舞台へ移行させるのが僕らの役目かな。観客が僕らの夢を垣間見ることが出来るように…
Daniel:「観客が僕らの夢を垣間見ることが出来るように…」ね。君たちはアーティストによって、人々の人生をより良くする事が可能だと思う?
Kaori :私は人々に旅してもらう事が好きね。日常から抜け出させること。
Daniel :上演中人々は日常から抜け出し、終わればまた元に戻っていくわけだけど…。彼らの中に何かが残ると思う?
Kaori :メッセージを押し付ける気は全くないの。一緒に過ごした時間から、何かが彼らに伝われば良いわ。
Daniel : 何を伝えたいのかな?
この劇は感性に強く訴える、何か強いものがあるはずだと思うのだけど…。
Sebastien :うん、わかるよ。何かがあるし、劇によって何かを伝えるのが僕たちの目的。でもその「何か」が何なのか、僕らには分からない。観客は僕たちを通して、物語や登場人物の心を受け取る。それで僕らの仕事は充分だって事なんだ。
Daniel :この物語は偶然に選んだわけじゃないんでしょ。
Sebastien : 僕らが選んだわけじゃないんだ。
Daniel :それでもこの物語は君たちに合っていて、観客の前で演じ続けている。もしかして、この物語は君たちの夢を反映していると思わない?とても個人的な夢を。
Sebastien : 僕らがこの昔話を演じる事が出来るのは、この物語が僕らそれぞれの内面性からそう遠くないから、と言えるかもしれない。実は、この物語は香里の母親が選んでくれたんだ。だから自分たちで選択したわけじゃないけど、香里の母は僕らにこれが合うと思ったから選んだわけだね。今になると、彼女がなぜこの物語を選んだのか、分かるんだ(笑)!僕らは、導く事もあれば導かれる事もある。僕たちは回りに助けてくれる人がいて幸せだと思うよ。
Daniel : 君たちはアーティストが持つべき責任ってあると思う?作品を発表する時、絵や音楽、ダンスなど、見る側にどんな影響があるか、責任を負わないといけないだろうか?
Sebastien :見に来てくれる人を尊重する責任があると思う。
Daniel : 尊重?どういう意味?
Sebastien : 彼らをまるで父のように思わないといけないって意味。僕らはみんな同じ家族だから。僕らの間には普遍的な橋がかかっている。その橋こそが、僕には興味深いんだ。アーティストでも人間でも、本来みんな孤独でしょ。みんな孤独だけど、時々そこに歩道橋がかかるんだね。僕らに責任があるとすれば、可能な限り作品を作っていく事かな。これはKAGOMEの目標でもある。アジア文化や感性をヨーロッパへ伝えていきたい。
Daniel :カオリ、ダンスを勉強している中、君はどうやってヨーロッパ文化に出会ったの?先生やヨーロッパの師匠から受けたショックってある?
Kaori:私はクラシックダンスから始めたから、すでにヨーロッパタイプのダンスだって言えるわね!ショックと言えば、実はフランスで舞踏に出会った時はショックだったわ!
Daniel :へえ~、まるで反対だね!君はフランスで日本の心に出会っちゃったってわけ!
Kaori : 当時、舞踏をやっている友達から一緒に仕事をしようって提案されたんだけど、一度は断ったの。その後2回目に同じ提案を受けた時、じゃあやってみようって思った。その時が舞踏家のカルロッタ池田さんとの最初の出会い。そして彼女の作品「春の祭典」の一役をもらったわ。舞踏の事を何も知らないでカルロッタ池田さんの劇団にいきなり入団したってわけ。大きな衝撃だったわ。舞踏は私がそれまで続けていたクラシックダンスとはまるで正反対の世界だったから。
カルロッタ池田さんと一緒に仕事をしたいと思ったのは、舞踏を実際に見たから、じゃないのよね。色々な巡り合わせが特殊に絡み合って出会いを呼び、自分の日本人としての根本に近づく事になった、というか。 その後2年間、カルロッタ池田さんと舞踏をしながらKAGOMEが出来上がったの。私にとって舞踏は大きなショックで、自分の国を強く意識したわ。
Daniel : 全く奇妙な出来事だね!君はフランスに戻ってきて日本を再発見…
セバスチャン:じゃなくて、新発見しちゃったってわけだね!
Kaori :この経験の後、2人の半分同士をミックスした劇を演じたいと思うようになったの。
Daniel : KAGOMEで君が演じる登場人物を思い起こさせるね!仮面をかぶって、半分は人間の女性、半分は鳥。
Kaori : 実は私、今まで日本の外で生きてきた時間のほうが長いの。でも私は日本人、日本生まれ、両親は2人とも日本人。まぁ、自分はどちらかと言えば日本人らしいと思うわ(笑)。
Sebastien:正真正銘の日本人に間違いないよ(笑)!僕にとってショックだったのはね、日本ではヨーロッパ文化に対して懐が深いでしょ。でも反対にフランス人は日本文化なんて何にも知らない!フランス人は自分の国と同じように他の国でも伝統的な文化があることをすぐに忘れちゃう。
Kaori :そうそう、セバスチャンに出会った時、彼ったら日本についてな~んにも知らなかったっけ
(笑)!
Sebastien:アジアに全く興味なかったもん、何も知らなかったよ!まるでダンスを始めた時と同じ!
Daniel:起こるべくして起こる、その時は来た(笑)!
Kaori:人生って素晴しいわよね。どうやって端と端の2人が出会うのか? しかも自分で決断したわけでもなく、向こうからやって来る…
Daniel : 僕らは何も決断しない?
Sebastien:何かにいつでも対応できるようにしておく!
Kaori:さっきの欲望と夢の違いの話に戻るけど、ひょっとしてヨーロッパ文化は欲望に近く、オリエント文化は夢に近い、と言えないかしら…アジア文化は夢を自由に想像しつつ、無理やり探しに行かずに時が来るのを待つ文化。でもヨーロッパ文化では欲望やエゴが非常に強いような気がするの…。
Daniel:ちょっとわかるかも。でもここ最近の傾向として、僕は世界中が欲望にコントロールされているような気がする…。でもひょっとしたら、実は夢に支配されているのかな?人はそれぞれみんな夢があって、叶えるために生きていると思う?
Sebastien:そうだといいよね…うん、そうだったらいいな(笑)!でも人生は1度きり、時間は沢山ないからなぁ、全員が夢を叶えられるとは確信出来ないな。もしかして、人生を数回輪廻すると考えればそうかもね。だから今の人生を受け入れて進むのみ。フラストレーションが溜まっちゃう人が多いのはそのせいかな。
Daniel : ある人がアーティストを目指すと決めたとしよう。そのために大きな犠牲が予想されるとしても、その人物には他の選択がなく、切迫していたと言えるだろうか?
Sebastien : 他の多くの事にも言えることだね!
Kaori :ダンスについて言えば、やっぱり身体的能力が重要ね。歳を取れば筋肉も変化してくる。クラシックダンスの世界では30歳を過ぎると、もう続けるには歳を取りすぎている、と言う人が多いの。でも私は全然そんな風に思わない。リミットはないと考えているの。自分をよーく見れば、自分が何者か見えてくるし、何をしているかも分かる。だから怖くなんてないわ!そんな切迫する必要もない。少しずつ進歩して、進んでいくのみ。
Daniel :でも、どこに向って進むの?
Kaori : 自分が一番得意なものに向って。
Daniel : 2人はダンスについてだけど、同じ質問を画家に対しても出来る。自分が一番得意なものに向うって言うのは、身体的なパフォーマンスについてのみ言えること?それとも他にも通じるものかな?自分の身体を道具のように使って、得意を極めるという事?
Kaori : 身体も精神も両方に言える。その2つが離れてしまう事はないわ。
Sebastien :僕らの作品について言えば、物語は人間について展開している。だからテーマは生と死。時間は無限にある、と試しに考えてみても実際はダモクレスの剣が常に、生か死か、と僕らの頭の上にぶら下がっている!これはかなり厳しいよ!生きることは切迫していて、自分が何者なのか見つけるために人生に身を投じる。これは夢じゃなく現実だもん(笑)。
Kaori :切迫?そうかしら、もしある日人生が終わってしまったとしても、そこまで生きられたこと、それだけで充分美しいでしょう?なぜリミットを決めてしまうのかしら。人生は無限なのに。生まれる前から運命も道も決まっていると思う事もあるけど、結局私たちにはそれは分からないじゃない。
Daniel :東西が補助し合って2人をまとめてるね(笑)!
Sebastien :哲学的に考えれば、無限性について僕も賛同するけどね。でも実際人生で出会う人々について言えば、やっぱり僕は緊急性を感じる。いるべき時にそこに絶対にいるべきだ!って。重要なことだよ。
Daniel :そういう経験、稀だよね!もしかして舞台でアーティストたちはその感覚を無意識に探求してる、かもしれない?
Sebastien :その通り。出会うべくして出会う感覚はみんなあると思う。夢を共に分かち合うために
(笑)!